Le Conseil Départemental de l’Education Nationale est co-présidé par le Préfet et le Conseil Général et réunit l’Inspecteur d’Académie, des élus du Conseil Général, du Conseil Régional, des communes du Département, des représentants des personnels(6 FSU, 3 UNSA, 1 SGEN), des associations de Parents, des DDEN …
Nous sommes réunis aujourd’hui pour faire le bilan de rentrée 2011.
Avant toute chose, nous tenons à souligner que le calendrier initialement prévu ne permettait pas aux représentants du personnel de préparer dans de bonnes conditions cette instance. En étant prévenu la veille des vacances de Toussaint que le CDEN se tiendrait le jour de la rentrée, il était évident que les collègues du premier degré auraient du mal à prévoir leur remplacement et à s’absenter ce jour là, sans parler de la quasi impossibilité de réaliser un travail de préparation dans des conditions normales en période de congés scolaires.
De plus, les représentants du personnel unanimes, avaient demandé que le CTPD ne se réunisse plus le jour même du CDEN, ne serait-ce que pour nous donner le temps de prendre du recul par rapport aux travaux préparatoires du comité technique. Nous réitérons cette demande pour le futur CTSD.
En ce qui concerne les documents eux-mêmes, si ce bilan de rentrée est relativement complet pour le second degré, il est notoirement insuffisant pour le premier degré, notamment par rapport à ceux des années précédentes. Les échanges que nous avons eu en Comité Technique permettent de dessiner quelques grandes lignes de la façon dont est en train de se transformer notre système éducatif, y compris en Savoie.
Nous soulignerons, tout d’abord, une exacerbation des inégalités entre établissements, inégalité en terme d’offre de formation, avec la multiplication de dispositifs propres à chaque établissement (sections sportives, sections européennes ou bilangues, …) mais aussi inégalités liées à l’assouplissement, pour ne pas dire la suppression de la carte scolaire. Ainsi, le collège de Côte Rousse a perdu depuis 2007 un tiers de ses effectifs et 24 postes d’enseignants, ce qui correspond pratiquement au tiers des postes supprimés en collège dans notre département. Cet assouplissement met à mal la mixité scociale et concentre de plus en plus des jeunes des milieux sociaux les plus défavorisés, souvent issus de l’immigration, sur quelques établissements-ghettos. Le collège Côte-Rousse en est l’illustration en Savoie. Cela n’est pas de nature à faciliter la réussite de ces élèves, nous le savons tous. Avec cette mise en concurrence des établissements, notre système éducatif est en train, peu à peu, d’adopter des modes de fonctionnements qui sont ceux du marché et cette dérive ne pourra qu’accentuer les inégalités sociales.
Dans ce bilan, particulièrement succinct pour le premier degré, vous avez tenu néanmoins, pour la première fois, à faire apparaître les bilans des évaluations nationales de CE1 et de CM2, en les présentant comme un outil de pilotage de votre politique départementale. La FSU a souligné à maintes reprises le manque de crédibilité de ces évaluations qui n’aident pas les enseignants à comprendre la nature des réussites et des difficultés des élèves, et leur côté réducteur, puisque ne sont pris en compte que les mathématiques et le français. Un rapport du mois de septembre, publié par le Haut Conseil de l’Education, disqualifie les indicateurs des « compétences de base » utilisés dans ces évaluations. Comment piloter sérieusement l’école avec des données aussi peu fiables ? Il serait, bien entendu, inacceptable que ces indicateurs deviennent un outil, dans le cadre de la LOLF, pour évaluer les établissements, voire les enseignants.
Enfin, un mot est revenu régulièrement lors du Comité Technique et dans la communication ministérielle de ces derniers mois : c’est l’expression « individualisation des parcours » érigée comme règle de fonctionnement de ce système éducatif. Nous soulignons que cette évolution conduit les familles à prendre de plus en plus tôt des décisions de plus en plus nombreuses qui vont conditionner la suite du parcours scolaire de leur enfant , parcours personnalisé en 3ème , enseignement d’exploration en seconde en sont deux exemples parmi d’autres. C’est oublier que beaucoup de ces familles, notamment les plus modestes, n’ont pas les clés pour faire ces choix en connaissance de cause. Et ce n’est pas la réforme de l’orientation qui va les aider, puisqu’actuellement tout le monde est déclaré orientateur (les professeurs principaux, bientôt sans doute des organismes privés labellisés …) alors que ceux dont c’est le métier ont de plus en plus de mal à l’exercer. Faut-il rappeler qu’après la fermeture du CIO de Moûtiers par le Rectorat, c’est maintenant le Conseil Général de la Savoie qui a décidé de se désengager du financement du CIO de Chambéry, en supprimant depuis la rentrée 2011 le budget destiné à rembourser les frais de déplacement des Copsy dans les établissements ?
Nous ajouterons que cette individualisation qui, par définition, veut rendre responsable l’individu de son parcours scolaire, le rend aussi responsable d’un éventuel échec, ce qui permet d’évacuer à bon compte le poids de situations sociales et familiales qui sont pourtant souvent les véritables raisons de la difficulté scolaire.
Là où le Ministre nous dit que la démocratisation de l’école est achevée et qu’il faut passer à l’individualisation des parcours, nous répondons que cette démocratisation avait à peine commencé, qu’il est grand temps de la relancer et que les choix qui sont faits aujourd’hui ne font qu’accentuer les inégalités au sein de l’école et, à terme, dans la société.
Dernière caractéristique de ce nouveau système éducatif, mais celle-là est plus médiatisée, c’est un système qui doit fonctionner chaque année avec beaucoup moins d’enseignants et les 14000 nouvelles suppressions de postes dans l’Education annoncées au budget 2012 vont encore aggraver les conséquences des orientations que nous venons d’évoquer. Les indicateurs internationaux pointent déjà le système français comme étant celui qui reproduit le plus les inégalités sociales. Comme le préconise le CESE dans son rapport du 13 septembre 2011, l’école doit, je cite, « renouer avec une ambition éducative pour tous » (…) notamment en « mettant le paquet » sur le premier degré et en relançant la politique d’éducation prioritaire. C’est exactement ce que la FSU propose.